1974 – Le Monde – La crise contraint les budgets de la voie d'eau.

En 1973, le pétrole voit son prix doubler, on entre dans la crise de l'énergie. Par ailleurs, plusieurs projets de liaisons interbassins, très coûteux, sont en compétition.

En 1974, trois liaisons fluviales interbassins sont dans les cartons, Seine-Est, Seine-Nord et Rhin-Rhône, selon Le Monde du 8 juin. Aucune date n'est évoquée sauf l'année 1982 pour l'achèvement de la liaison mer du Nord-Méditerranée. Seine-Nord est défendue par Jacques Trorial, président du port autonome de Paris et président du Comité français de liaison pour la promotion de la voie d'eau. Seine-Rhin par la Moselle a aussi ses partisans et le Plan en cours comporte des crédits pour en réaliser des sections.

« Pour la liaison Seine-Est, le VIe Plan a prévu un investissement en fonds publics de 200 millions de francs concernant une première tranche sur la section Compiègne-Reims dont les travaux sont estimés à 400 millions de francs environ.  »

Le budget, c'est bien la question. Tandis que l'Allemagne dépense au total pour ses voies fluviales 700 millions de DM, la France se situe bien en dessous, à 400 millions de FF. Une solution évoquée serait de confier le travail à une entreprise publique ou mixte, avec des crédits d’État.

« À cet égard les professionnels du transport fluvial suggèrent que la Compagnie nationale du Rhône, chargée des études de la liaison mer du Nord-Méditerranée, se voit confier immédiatement les études de rentabilité de franchissement du seuil séparant le bassin de la Seine de celui de la Moselle.  »

L'assemblée régionale de Rhône-Alpes a aussi des idées pour trouver de l'argent, comme on l'apprend dans Le Monde du 4 mars 1975.

« Sous la forme d'un vœu qui sera joint à ce dossier préparatoire au Plan, le conseil de Rhône-Alpes a réaffirmé le caractère indispensable de la liaison Rhône-Rhin, axe fluvial le long duquel il espère vivement que s'implanteront des industries lourdes. Il a rappelé enfin qu'au cours d'une session précédente il avait vivement souhaité voir la CNR (Compagnie nationale du Rhône) être autorisée à contracter des emprunts pour réaliser les aménagements hydro-électriques du haut Rhône : cinq chutes susceptibles de produire près de 2 millions de kilowatts-heure.  »

Si on ne sait pas vraiment comment financer les travaux, des évaluations de coût de construction circulent. Dans Le Monde du 19 juin 1974, les comparaisons semblent désigner Seine-Nord comme le moins éloigné d'une réalisation :

« La construction d'une nouvelle voie fluviale entre l'Oise à Compiègne et le canal Dunkerque - Valenciennes au nord de Cambrai ne coûterait qu'un milliard de francs de 1970 environ pour 120 kilomètres (1), au lieu de 3 milliards pour la liaison entre la Seine et la Moselle (250 kilomètres) et 4 milliards et demi pour la jonction entre le Rhône et le Rhin (450 kilomètres). La rentabilité est évaluée à 10,6 % au lieu de 5 % pour Rhin-Rhône et 4 % pour Seine-Est. »

Le canal du Nord transportait à cette époque 10 millions de tonnes entre Seine et Escaut (3 millions aujourd'hui). Le projet Seine-Nord de l'époque, avec ses onze écluses, donnerait un accès rapide aux pays du marché commun, avec des convois de 4 000 tonnes.

La discussion du budget 1976 pour le VIIe Plan est l'occasion pour le ministre de l’Équipement Robert Galley de quelques mises au point, lesquelles furent publiées dans Le Monde du 23 juin 1975. Il loue les convois fluviaux poussés pour leurs qualités d'économie d'énergie, c'est l'époque de la chasse au « gaspi » et indique qu'il faut d'abord finir d'aménager les vallées (Moselle, Rhin, Rhône et Saône, outre le canal Dunkerque-Valencienne). Mais il s'en tient à des généralités au sujet des liaisons de bassin à bassin.

« Que restera-t-il alors dans les budgets pour les travaux coûteux de franchissement des seuils ? M. Galley est resté très évasif sur ce point : Il faut faire un choix net, et, si nous décidons de franchir un seuil de bout en bout, nous devons prévoir la mise en place des moyens nécessaires pour mener l'opération à son terme dans un délai raisonnable. Rhin-Rhône, Seine-Nord ou Seine-Est en priorité ? De toute façon, a indiqué M. Galley, nous ne pouvons tout faire à la fois, et il faudra que les régions comprennent qu'elles doivent mettre la main à la poche »

On apprend plus loin que Seine-Est, passant par l'Aisne, coûterait 910 millions de FF contre 5,6 milliards pour Rhin-Rhône.
L'inflation à deux chiffres a fait revoir à la hausse les évaluations du coût de ces grands projets.